Les organisations membres du Bureau de liaison des organisations du cinéma (BLOC) expriment leur étonnement et leur désaccord à la lecture de l’interview de Maxime Saada, Directeur général du groupe Canal Plus, dans le Figaro d’aujourd’hui.

Il y est indiqué que face à une situation financière tendue et surtout à l’émergence de Netflix, d’Amazon et d’Altice Studio, qui n’ont signé aucune obligation d’investissement dans le cinéma, « coup Canal + a décidé de remettre à plat ses relations avec le cinéma », en formulant un certain nombre de demandes nouvelles, incompatibles avec la réglementation actuelle et les accords professionnels le liant au cinéma jusqu’au 31 décembre 2019 qui lui confèrent un statut privilégié lui permettant notamment d’effectuer jusqu’à 50 multidiffusions assorties chacune d’une semaine de télévision de rattrapage.

Ces demandes remettraient en cause cette réglementation et ces accords, et aboutiraient toutes ensemble à abaisser encore plus drastiquement les investissements de Canal Plus dans le cinéma, qui ont déjà chuté lourdement en 2017, de 35 millions d’euros, ce qui est d’ores et déjà d’une grande gravité pour le secteur.

Les organisations du BLOC entendent rappeler que si Canal Plus annonce une telle baisse de ses investissements en préachat de films français et européens, c’est précisément parce que ses obligations ont pris en compte la baisse de son chiffre d’affaires.

Accroître encore cette baisse serait délétère pour la création cinématographique française, tout particulièrement la création indépendante, et se ferait au détriment de la diversité des films disponibles sur Canal Plus, alors qu’il s’agit de la première motivation d’abonnement à ce service.

Elles tiennent à souligner que la position de Netflix, d’Amazon et d’Altice ne justifient nullement la virulence de la réaction de Canal Plus à l’égard du cinéma français.

Tout d’abord, Netflix et Amazon étant des services de vidéo à la demande par abonnement, ils sont actuellement situés à 36 mois dans la chronologie des médias, alors que Canal Plus diffuse les œuvres à 10 mois après leur sortie nationale.

Ensuite, si Altice Studio avance qu’elle est basée au Luxembourg pour tenter de s’exonérer des obligations d’investissement dans le cinéma prévues par le droit français, l’ensemble des organisations professionnelles du cinéma et de l’audiovisuel n’en ont pas moins saisi le CSA car, selon leur analyse, cette chaîne est dans les faits à la fois basée en France et destinée au public français. Ce sujet est donc entre les mains de l’instance de régulation, dont la réponse est attendue par tous.

Enfin, la Ministre de la culture a nommé un médiateur sur la chronologie des médias, qui commence à peine ses auditions. Le BLOC rappelle à ce sujet qu’il milite pour la mise en place d’une différenciation plus marquée des fenêtres des opérateurs « vertueux » tels que Canal Plus par rapport à celles des opérateurs qui ne le sont pas.

Dans ces conditions, les demandes de Canal Plus sont contre-productives et ne reflètent nullement les efforts constants des organisations du BLOC, pour accompagner le groupe Canal Plus dans ses mutations et « faire bouger les lignes ».

Elles ne rendent pas justice aux positions prises par le BLOC auprès de l’Autorité de la concurrence pour redonner au Groupe Canal Plus l’exclusivité de distribution du bouquet Ciné Plus, pour assouplir l’interdiction de l’exclusivité qui lui était imposée en matière de vidéo à la demande et pour défendre le principe fondateur de l’auto-distribution.

Les reproches effectués à l’encontre de la filière en matière de lutte contre le piratage occultent le fait que ce sujet, prioritaire pour l’ensemble de la filière, est très largement entre les mains des pouvoirs publics et que, sans attendre une action enfin déterminée de ces derniers contre ce fléau, un certain nombre d’organisations du cinéma ont agi en justice pour obtenir le blocage d’accès et le déréférencement de dizaines de sites illicites.

Elles appellent donc Canal Plus à renforcer son partenariat avec le cinéma français dans sa diversité, qui est au cœur de l’attractivité de son offre pour le public.